QUELLES SONT LES VERTUS SANTÉ DU MIEL ?
Seuls les miels monofloraux clairement identifiés feront l’objet de ce chapitre, même si, bien entendu, dans l’absolu, ils ne peuvent jamais l’être parfaitement. Les propriétés thérapeutiques de chacun d’eux sont donc variables.
Les vertus santé des miels
Les vertus santé des miels sont attribuables à certains composés d’intérêt agissant seuls ou en synergie. À la différence des plantes, les miels sont les parents pauvres de la recherche, mais il semblerait que certains possèdent les mêmes propriétés que la fleur butinée, par transfert de certains composés¹⁵.
Cependant, nous manquons encore cruellement de connaissances sur la nature et la teneur des principes actifs contenus dans les miels les plus courants en France. Nous pourrions pallier ce déficit en suivant l’exemple du gouvernement néo-zélandais pour le miel de Manuka (voir Article en cours…).
LES BIENFAITS SANTÉ DU MIEL
Les bienfaits santé du miel répertoriés par la médecine traditionnelle sont nombreux et leur mise en évidence est issue de travaux empiriques (voir tableau 3). Ainsi, il aurait une action:
- dynamisante, apéritive et antioxydante,
- facilitatrice de l’assimilation des nutriments et minéraux, antianémique,
- émolliente, laxative, digestive (par réduction de l’acidité gastrique), hépato- et cardio-protectrice,
- sédative et hypotensive,
- antibactérienne, fébrifuge (qui fait tomber la fièvre) et cicatrisante.
Si beaucoup de ces activités n’ont pas encore été formellement confirmées par la science, certaines l’ont été et, dans ce cas, le mode d’action du miel pour chacune d’elles a été élucidé.
Avant d’évoquer les propriétés du miel, rappelons qu’il présente une innocuité quasi totale et une très bonne tolérance. C’est un aliment aux nombreux avantages nutritionnels et énergétiques. En effet, il apporte l’énergie (environ 350 kcal/100 g) nécessaire aux muscles, au cœur et au cerveau. De ce fait, il peut être intéressant dans l’alimentation des sportifs.
TABLEAU 3: PROPRIÉTÉS THÉRAPEUTIQUES SUGGÉRÉES POUR DIFFÉRENTS MIELS LOCAUX¹⁶
ACTIVITÉ CICATRISANTE
De nombreux écrits anciens attestent de l’utilisation coutumière du miel pour soigner les plaies. Mais ce n’est qu’en 1906 que le docteur Jonathan White Jr. étudie scientifiquement l’effet antiseptique du miel sur les plaies¹⁷. En France, le professeur Bernard Descottes du CHU de Limoges a beaucoup travaillé ces dernières années sur des protocoles de cicatrisation au miel.
Rappelons que le processus de cicatrisation se caractérise par quatre étapes successives:
- la phase inflammatoire et vasculaire caractérisée par la coagulation, l’agrégation plaquettaire et la formation du caillot de fibrine;
- la phase de bourgeonnement durant laquelle une croûte apparaît à la place du caillot et de nouveaux vaisseaux sanguins se forment;
- la phase de ré-épithélialisation au cours de laquelle la matrice extracellulaire du derme se reconstitue;
- et enfin la phase de remodelage: la cicatrice devient esthétique, structurée et fonctionnelle.
Ces phases sont interdépendantes et le miel intervient dans chacune d’elles.
Elles réduisent l’inflammation
Certains composés aux vertus anti-inflammatoires (flavonoïdes) réduisent l’inflammation et la quantité d’exsudat sécrétée via une moindre perméabilité des vaisseaux. Ce contrôle de l’inflammation et des phénomènes associés limite le risque de cicatrices disgracieuses.
Il favorise l’afflux vers l’extérieur
Le fort pouvoir osmotique du miel favorise l’afflux vers l’extérieur des fluides contenus dans la plaie. Ce phénomène est propice à l’entrée en action des cellules du système immunitaire, des cytokines (médiateurs de l’inflammation) et des facteurs de croissance. Si la plaie n’est pas nécrosée, ce drainage suffit à la nettoyer.
Des éléments nutritifs
Le produit de la glucose-oxydase (le peroxyde d’hydrogène) contenue dans le miel est à l’origine de la prolifération des cellules du tissu conjonctif (fibroblastes) et de celles de l’épithélium (tissu de cellules juxtaposées à la surface du corps). Cette phase de croissance tissulaire bénéficie des éléments nutritifs apportés par le miel.
Crée une barrière protectrice
La viscosité du miel crée une barrière protectrice qui permet de limiter l’entrée de germes dans la plaie. Pour se multiplier, les bactéries consomment des protéines dont la dégradation entraîne la formation de métabolites azotés malodorants tels que l’ammoniaque. Cependant, en présence de miel, elles se nourrissent préférentiellement de sucre, si bien que la plaie ne dégage pas d’odeur désagréable.
Enfin, le miel crée un environnement humide autour de la plaie et une interface avec le pansement très importante, car :
- elle empêche, d’une part, la compresse d’adhérer à la plaie, ce qui minimise la douleur au moment du retrait,
- et évite, d’autre part, la croissance de tissus entre les mailles de la compresse.
Le risque d’arracher ces tissus en renouvellement est ainsi prévenu¹⁸.
Permet de cicatriser deux fois plus vite
Les phénomènes impliqués dans la cicatrisation sous l’effet du miel ont été largement étudiés et décryptés. Le professeur Descottes a observé que le miel de thym permet de cicatriser deux fois plus vite pour un coût environ vingt-cinq fois inférieur à celui des traitements conventionnels. L’application de miel réduit aussi la durée d’hospitalisation et donc le coût global du traitement¹⁹.
Rappelons qu’avant d’être efficace, un miel doit présenter une totale innocuité. Or, un produit vivant peut renfermer des contaminants. Il faut donc choisir des miels médicaux (que l’on trouve en pharmacie) qui assurent innocuité et préservation des propriétés²⁰.
ACTIVITÉ ANTI-BACTÉRIENNE
L’activité antimicrobienne du miel a été découverte à la fin du XIXe siècle et connaît un regain d’intérêt depuis les années 2000. L’augmentation des résistances aux antibiotiques courants de la plupart des germes n’y est pas pour rien. La capacité du miel à lutter contre les microbes varie en fonction de la complémentarité de ses composants physico-chimiques²¹:
- Le peroxyde d’hydrogène (H2O2), l’un des principaux antimicrobiens, issu de la transformation du glucose, est libéré progressivement avec un maximum dans les premières 24 à 48 h. Anciennement appelé inhibine, cet antimicrobien est généré par la voie peroxydasique.
- L’acide gluconique contribue à acidifier le miel, or les bactéries se développent très mal en milieu acide. De plus, il agit en séquestrant les ions métalliques présents dans les membranes des bactéries avec pour résultat de bloquer les échanges entre l’intérieur et l’extérieur et de compromettre leur prolifération²².
La vigilance s’impose quant à la qualité du miel utilisé car l’exposition à la chaleur, la lumière etune durée de stockage supérieure à quinze mois remettent encause les propriétés précédentes (cela inactive les enzymes impliquées).
- Le miel, par sa grande richesse en sucres, a le pouvoir de contribuer à la destruction des bactéries en attirant l’eau contenue dans leurs membranes (phénomène de lyse). Cependant, la dilution – due notamment à la production d’exsudats par la plaie – réduit ce pouvoir. Ainsi dilué dans trois à cinq fois son volume d’exsudats, le miel n’a plus d’effet contre le staphylocoque doré²³.
- Un peptide (bêta-défensine 1 semblable aux défensines présentes chez l’homme qui interviennent dans la réponse immunitaire immunitaire innée) transmis par l’abeille au miel aurait un large spectre d’action antimicrobienne encore mal connu. L’agrégation de ces défensines à la cellule hôte bactérienne provoquerait sa destruction²⁴.
- Le miel contient des flavonoïdes (pinocembrine, chrysine, apigénine…) et des molécules aromatiques (linalol, menthol, carvacrol…) dont les propriétés antibactériennes ont été démontrées. Mais ces principes actifs n’ont pas tous été identifiés et varient surtout d’une espèce botanique à l’autre, d’où des différences d’activité en fonction de la variété de miel²⁵.
- Le méthylglyoxal (MGO), composé chimique présent dans les produits riches en sucres, possède une forte activité antimicrobienne sur un spectre plus ou moins large de bactéries. Il est présent naturellement dans tous les miels à très faible concentration, à l’exception du miel de Manuka qui peut être jusqu’à mille fois plus concentré, ce qui rend son utilisation discutable (voir Article en cours…). Ce MGO représente la voie non peroxydasique.
ACTIVITÉ ANTITUSSIVE
La toux fait le plus souvent suite à une infection virale des voies respiratoires supérieures. Il ne s’agit pas d’une maladie mais d’un symptôme que l’on peut considérer comme un réflexe naturel de défense. Elle n’en est pas moins inconfortable, en particulier la nuit.
Antitussif ou Miel ?
On estime que tout enfant scolarisé vit sept à dix épisodes viraux chaque année. La consultation médicale se conclut généralement par la prescription d’un antitussif, inefficace selon de nombreuses études.
À partir de ce constat, une étude a comparé les réactions de cent cinq enfants présentant une toux bénigne supposée virale. Le premier groupe n’a reçu aucun traitement, le deuxième a pris un antitussif et le troisième du miel de sarrasin. Une diminution significative de la fréquence, de la gravité et de la nature incommodante de leur toux, ainsi qu’une meilleure qualité de sommeil ont été observées chez les enfants traités avec le miel par rapport au groupe sans traitement.
Conclusion
La différence avec l’antitussif n’était pas significative, bien que légèrement en faveur du miel. Le miel peut donc être un traitement de choix en cas de toux bénigne pour soulager les crises nocturnes chez les enfants de plus d’un an²⁶.
ACTIVITÉ ANTIOXYDANTE
La couleur foncée d’un miel est révélatrice d’une plus grande quantité de minéraux et de polyphénols. Et plus un miel est riche en polyphénols, plus il est antioxydant²⁷.
La composition moyenne en polyphénols et composés aromatiques de chaque miel monofloral mériterait d’être étudiée afin d’établir une «carte d’identité» propre. Elle permettrait de préciser les indications thérapeutiques en fonction de l’origine botanique.
Le champ de la recherche reste vaste, tant pour valider les propriétés suggérées des différents miels que pour percer leur mode d’action ou identifier les composants à l’œuvre.
15. KASSI E, CHINOU I, ET AL. A monoterpene, unique component of thyme honeys, induces apoptosis in prostate cancer cells via inhibition of Nf b activity and Il-6 secretion. Phytomedecine. 2014, 216-25.
16. METRAL O. Le Miel dans votre pharmacie. Baroch. 2014, p. 52.
17. RAPINAT M. Apithérapie: le miel, la propolis et le venin d’abeille, propriétés et exemples d’utilisations. Thèse de doctorat en Pharmacie. Université de Clermont-Ferrand I. 2014, p. 12.
18. RAPINAT M. Apithérapie: le miel, la propolis et le venin d’abeille, propriétés et exemples d’utilisations. Thèse de doctorat en pharmacie. Université de Clermont-Ferrand I. 2014, p. 20-23.
19. DESCOTTES B. Miel et cicatrisation. Abeilles et fleurs. Spécial apithérapie. 2000, p. 34-43.
20. HUSSEIN SZ, YUSOFF KM, ET AL. Does gamma irradiation affect physicochemical properties of honey? Clin. Ter. 2014, 165: 125-33.
21. BLANC M. Propriétés et usage médical des produits de la ruche. Thèse de doctorat en pharmacie. Université de Limoges. 2010, p. 11-12.
22. MAZET-ABRAN C. Un atout pour la cicatrisation: le miel. DU plaies et cicatrisation. Montpellier. 2011, p. 6-26.
23. COOPER RA, MOLAN PC, HARDING KG. The sensitivity to honey of gram-positive cocci of clinical significance isolated from wounds. J. Appl. Microbio. 2002, 93: 857-63.
24. LECHAUX D. Le miel et la cicatrisation des plaies. https://www.abcd-chirurgie.fr/mediastore/fckEditor/file/TAP.pdf.
25. METRAL O. Le Miel dans votre pharmacie. Baroch. 2014, p. 23.
26. SAMMUT S, CARDINAULT N. Le miel et la toux chez les enfants. Abeilles et fleurs, 2013.
27. ALZAHRANI HA, ALSABEHI R, ET AL. Antibacterial and antioxidant potency of floral honeys from different botanical and geographical origins. Molecules. 2012, Sep 4;17(9): 10540-9.
Source : Nature & Vitamines P.26-34
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